C’est sur le versant autobiographique de l’œuvre d’Albert Cohen (1895-1981) que l’article se focalise, et plus précisément sur Ô vous, frères humains, publié en 1972, objet d’une première version intitulée « Jour de mes dix ans » paru dans La France libre en 1945, alors que Cohen se trouvait en exil à Londres. Ce récit de l’acte d’exclusion frappant un enfant juif le jour de son anniversaire, qui se mue en supplique adressée aux êtres humains, dans une invocation rejoignant celle du poète François Villon, se trouve relayée dans l’écrit testamentaire des Carnets 1978 par un écrivain âgé qui délivre un ultime message à «ses frères en la mort», adoptant la posture du moraliste face à l’histoire à la fois personnelle et universelle, afin de clamer, dans son « juif rabâchage », sa foi inébranlable en la « tendresse de pitié ». Ainsi, la démarche adoptée, d’une part, suit le fil d’Ariane de l’intertextualité interne et de la migration transgénérique cohénienne, inaugurée par Alain Schaffner dès 1999, d’autre part, aborde, sous un éclairage lexicologique, par le biais de la consultation du Trésor de la langue française informatisée, plusieurs occurrences significatives ayant trait à la profération xénophobe, renvoyant à des thèmes fédérateurs pour Cohen. L’analyse des formes aptes à exprimer la haine de l’étranger, rattachée notamment à la harangue du camelot, dans le climat d’antisémitisme qui ne cesse de s’exacerber à Marseille comme partout en France en ce début du XXe siècle, permet ainsi de mettre à nu, au-delà de pratiques langagières porteuses de sens, la question, brûlante d’actualité, du rôle du langage dans toute forme de discrimination.
Du récit de la fraternité niée à l’appel de la tendresse de pitié : Ô vous, frères humains d’Albert Cohen
Laurence Audeoud
2022-01-01
Abstract
C’est sur le versant autobiographique de l’œuvre d’Albert Cohen (1895-1981) que l’article se focalise, et plus précisément sur Ô vous, frères humains, publié en 1972, objet d’une première version intitulée « Jour de mes dix ans » paru dans La France libre en 1945, alors que Cohen se trouvait en exil à Londres. Ce récit de l’acte d’exclusion frappant un enfant juif le jour de son anniversaire, qui se mue en supplique adressée aux êtres humains, dans une invocation rejoignant celle du poète François Villon, se trouve relayée dans l’écrit testamentaire des Carnets 1978 par un écrivain âgé qui délivre un ultime message à «ses frères en la mort», adoptant la posture du moraliste face à l’histoire à la fois personnelle et universelle, afin de clamer, dans son « juif rabâchage », sa foi inébranlable en la « tendresse de pitié ». Ainsi, la démarche adoptée, d’une part, suit le fil d’Ariane de l’intertextualité interne et de la migration transgénérique cohénienne, inaugurée par Alain Schaffner dès 1999, d’autre part, aborde, sous un éclairage lexicologique, par le biais de la consultation du Trésor de la langue française informatisée, plusieurs occurrences significatives ayant trait à la profération xénophobe, renvoyant à des thèmes fédérateurs pour Cohen. L’analyse des formes aptes à exprimer la haine de l’étranger, rattachée notamment à la harangue du camelot, dans le climat d’antisémitisme qui ne cesse de s’exacerber à Marseille comme partout en France en ce début du XXe siècle, permet ainsi de mettre à nu, au-delà de pratiques langagières porteuses de sens, la question, brûlante d’actualité, du rôle du langage dans toute forme de discrimination.File | Dimensione | Formato | |
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